Face à l’invasion des IA génératives, vous avez le choix :
- Faire comme les canuts et casser les métiers à tisser. Spoiler : ça n’a pas marché en 1831.
- Faire comme les artistes qui crachaient sur Internet en 1999 et qui sortent une partie de leur production seulement au format numérique (je pense à toi Thom Yorke que j’adore mais aussi à d’autres)
- Ou accepter l’évidence : l’IA ne va pas disparaître parce que vous croisez les bras. Mais attention, elle ne va pas non plus faire le boulot à votre place.
Autour de moi, j’ai des technophiles et des technophobes. Je crois que cette vision manichéenne de l’IA ne s’accorde pas avec grand chose, le manichéisme ne s’accorde généralement avec rien. Pour moi, il n’y a pas à être pour ou contre le marteau. Il faut savoir à quoi il peut nous servir.
L’IA va tout faire à votre place
Les protech vous racontent que l’IA va pondre votre appli, votre storyboard ou votre campagne pub en cinq minutes, là où des humains mettraient cinq jours. Pour ceux qui pensent que j’exagère :

C’est sans doute vendeur. J’ai testé !
J’ai demandé à une IA de coder un agrégateur de newsletters locales. Dans cet exemple, j’ai pris Claude Code d’Anthropic mais j’aurais pu prendre Jules de Google pour le même résultat (les gens qui choisissent les nom d’IA doivent être certaines de mes connaissances un peu bobos sur les bords). J’ai mon code, je n’ai pas écrit une seule ligne de code mais soyons honnêtes je ne suis pas un newbie non plus. Spoiler : ça m’a pris plusieurs heures. Sans moi pour corriger et guider, faire des choix techniques, j’aurais eu un beau code non fonctionnel donc inutile. Comme ce Père Noël généré par IA : quatre doigts à une main, quatre et demi ou cinq à l’autre.Par contre, contrairement à certains, pas sûr que je l’aurais mis en production.

Hallucination as a feature
L’hallucination n’est pas un bug, c’est une fonctionnalité. Quand on configure une IA, ce que je me suis amusé à faire pour ce projet d’IA locale. On peut ajuster son niveau de « créativité » comprenez : son talent pour inventer n’importe quoi avec aplomb. J’exagère, l’IA générative ne fait pas ça consciemment mais c’est un biais de fonctionnement. Voici les curseurs magiques (et leurs effets secondaires) :
- La Température (souvent entre 0.0 et 1.0 ou plus) agit comme le principal curseur de « créativité ». Une température proche de 0.0 contraint le modèle à choisir le mot statistiquement le plus probable, rendant les réponses très cohérentes avec les données d’entraînement et donc fiables, mais prévisibles. Sérieusement, l’IA n’est pas un moteur de recherche ou un clone de wikipedia. À l’inverse, une température plus élevée (0.5 et au-delà) augmente la probabilité que l’IA choisisse des mots moins fréquents, ce qui peut mener à des textes originaux, créatifs, mais également plus sujets à l’hallucination (c’est-à-dire l’invention factuelle, comme attribuer la construction de la Tour Eiffel à Léonard de Vinci). C’est intéressant pour l’écriture de fiction ou de fake news.
- Les paramètres
top_p(échantillonnage par noyau) ettop_k(échantillonnage par les k meilleurs) fonctionnent comme des filtres sur le vocabulaire possible. Un réglage bas pour ces deux paramètres limite le choix de l’IA aux mots les plus probables (ceux qui ont une forte probabilité cumulée, ou ceux qui se trouvent parmi les k plus probables), assurant ainsi une grande cohérence avec le sujet initial. Un réglage plus haut permet au modèle de piocher dans un ensemble de mots beaucoup plus vaste, offrant plus de surprise et de variété dans le discours, mais augmentant le risque d’introduire des idées farfelues ou sans rapport direct. Ces deux paramètres sont rarement utilisé simultanément. - Enfin, le
repeat_penaltyest utilisé pour décourager la répétition immédiate de mots ou de phrases. Une pénalité faible peut entraîner un radotage ou une insistance sur les mêmes concepts. Une pénalité plus forte force l’IA à diversifier son vocabulaire, ce qui est généralement positif pour la qualité du texte, mais peut, à l’extrême, la pousser à générer des phrases sémantiquement étranges ou à changer de sujet de manière abrupte pour éviter le moindre retour en arrière.
Apprendre à écrire ses prompts pour limiter l’hallucination est, à mon avis, très important. Cela permet de gagner un temps précieux dans l’utilisation de l’IA.
Cachez ce smartphone que je ne saurais voir
La phrase pourrait résumer l’attitude de certains face aux nouvelles technologies. Pourtant, l’histoire nous montre que refuser un outil en bloc, c’est souvent ignorer qu’il est déjà partout et que son absence nous handicape plus qu’elle ne nous protège.
Prenez Internet. Dans les années 1990, certains artistes, intellectuels ou artisans le dénonçaient comme une menace pour la culture, l’artisanat ou même la pensée. Aujourd’hui, même les plus réticents admettent qu’Internet n’a pas tué la littérature ni l’art : il a changé leurs formes, leurs canaux, et parfois leurs modèles économiques. Ce n’est pas la fin de la création, mais une nouvelle façon de la partager même dans les endroits où la censure est la plus dure.
Idem pour le smartphone. Rien n’empêche d’acheter des cartes IGN mais l’appli permet de faciliter la randonnée. Je veux faire un virement, grâce au smartphone et Internet, pas besoin de prendre une demie-journée pour aller faire la queue à la banque. C’est un choix que certains peuvent trouver déshumanisant. Personnellement, je préfère sociabiliser avec mes voisins et mes amis qu’avec un employé de banque. Je ne dis pas ça pour toi qui est mon pote et employé de banque si jamais tu me lis.
L’IA suit la même trajectoire. La rejeter en bloc, c’est un peu comme refuser le marteau parce qu’on a toujours enfoncé des clous avec un caillou. Le caillou fonctionne mais c’est moins pratique qu’un marteau.
Faut-il utiliser l’IA ?
Le vrai débat n’est donc pas « Faut-il utiliser l’IA ? », mais « Comment l’utiliser ? » Comment en faire un levier, et non une béquille ? Comment garder le contrôle, sans se priver des opportunités qu’elle offre ?
L’IA simplifie. Elle accélère. Elle peut même inspirer.
- Pour un développeur, c’est un super copilote (vous avez la blague ?) à condition de savoir piloter.
- Pour un graphiste, c’est une source d’idées mais si vous n’êtes pas capable de donner une base et de retoucher la sortie, il y a des chances que la sortie ne soit pas prête pour la publication.
- Pour l’écriture, c’est un générateur de premières ébauches mais si vous vous en servez vraiment pour écrire, il faut prévoir du temps pour récupérer les hallucinations. L’IA peut également servir à automatiser des tâches rébarbatives comme calculer les temps de trajets.
- Comme vu précédemment, on peut utiliser l’ia pour les devoirs des enfants, pour concevoir des campagnes de jeux de rôles… mais en gardant à l’idée le biais d’hallucination.
Refusant la vision manichéenne du monde, je refuse :
- la vision technophile qui remplace n’importe quel humain par un robot
- la vision technophobe qui remplace n’importe quel humain par un robot
L’IA est un outil. Il y a dix ans, on me disait que le no-code allait me remplacer rapidement, ce n’est pas encore le cas. Mon métier change, je m’adapte.
Alors avant de crier au génie ou à l’apocalypse, il faut apprendre à s’en servir. Parce qu’un marteau, ça enfonce des clous mais ça ne construit pas une maison. Si un maçon ou un charpentier vous disait le contraire, je pense que vous le regarderiez bizarrement.



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